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Écrans et intériorité – mai 2022

En mai, le thème portait sur l’emprise grandissante des écrans dans nos vies et celles de nos enfants. La conférence introductive du Père Jean-Baptiste Bienvenu auteur du livre « Ils nous bouffent » a interpellé les parents sur le danger que représente le virtuel pour la construction de la personnalité et la vie intérieure. Les échanges qui ont suivi ont soulevé l’importance de notre exemplarité ( Ô combien exigeante !) dans ce domaine.

Les écrans sont ils des poisons lents pour l’intériorité de nos enfants ?

-Comment nos enfants peuvent-ils être prisonniers des écrans ?

Il s’agit ici de prendre collectivement conscience des impacts potentiels de la consommation d’écrans par nos enfants alors que nous cherchons à cultiver l’esprit de nos enfants. Partons d’un constat:

La consommation du numérique sous toutes ses formes, y compris à des fins d’apprentissage, par les nouvelles générations est astronomique. Selon M. Desmurget, dès 2 ans, les enfants des pays occidentaux cumulent chaque jour presque 3 heures d’écran. Entre 8 et 12 ans, ils passent à près de 4 h 45. Entre 13 et 18 ans, ils frôlent les 6 h 45. En cumuls annuels, ces usages représentent autour de 1 000 heures pour un élève de maternelle (soit davantage que le volume horaire d’une année scolaire), 1 700 heures pour un écolier de cours moyen (2 années scolaires) et 2 400 heures pour un lycéen du secondaire (2,5 années scolaires).

  • Que mettons-nous concrètement derrière les écrans ? : accès internet, réseaux sociaux, contenus pédagogiques, ludiques, informatifs, etc… 
  • En quoi les écrans peuvent-ils être des armes de distraction massive ? danger de la déhierarchisation des événements pour l’enfant.
  • Les écrans peuvent-ils affecter la liberté de nos enfants ? Quels effets sédatifs et addictifs peuvent-ils avoir ?  danger de la désarticulation des sens.
  • Que manquent nos enfants à être prisonniers des écrans ? le rapport à l’autre de nos enfants est affecté car les écrans empêchent le dialogue de qualité et l’écoute réelle. Ils sont un obstacle à l’engagement communautaire dans le quotidien de l’enfant.

M. Desmurget, La fabrique du crétin digital – Les dangers des écrans pour nos enfants, Seuil, 2019.

A. Leproux, « L’astre maudit », ou l’écran comme prison de l’âme ?, Conférence donnée le 5 mars 2020 à Stanislas.

– Comment « sortir de la matrice » ou passer de l’autre côté du miroir de nos écrans?

Il s’agit ici d’imaginer des stratégies de dépassement pour maîtriser les écrans et, lorsque
c’est nécessaire, parvenir à  en tirer le meilleur usage vertueux et pédagogique. Le but étant de préserver les quatre dimensions anthropologiques fondamentales ( le corps, l’intelligence,le coeur et l’esprit) sans pour autant fuir la révolution technologique portée par les écrans.

  • Comment réduire l’exposition aux écrans ?
  • Quelle distinction faisons-nous entre les différents types d’écrans, qui peuvent appeler à des modes de gestion différents : smartphone, ordinateurs familiaux / personnel, tablette, etc…
  •  Est-il possible d’organiser une ascèse propre aux écrans ?
  • Cela doit-il ou peut-il procéder de méthodes toutes faites ? D’astuces disciplinaires ? (Pas d’écran à tel moment de la journée, pas d’écran à table, pas d’écran dans la chambre, pas d’écran en telle ou tellecirconstance, etc.) d’outils de contrôle (logiciel, temps d’écran,suppression des navigateurs internet et fermeture du store sur les smartphone, etc…) ? 
  • Par quoi remplacer les écrans, par exemple dans les domaines éducatif,de loisir (jeux de société, …), relationnel, etc…?
  • Quelle valeur d’exemplarité pour les parents en la matière ? vertu de la discipline collective et familiale pour se détacher des écrans.

Pour nous guider vers cet usage usage vertueux des écrans, le père Bienvenu nous a donné quelques pistes lors de sa conférence.Cette révolution technologique est une inversion anthropologique majeure: habituellement l’intelligence humaine crée un outil pour répondre à un besoin, avec le numérique on réfléchit à des outils qui créent des besoins. Donc il faut changer notre point de vue pour considérer le problème des écrans pour nos enfants. Le problème des écrans n’est pas simplement un problème d’éducation, un problème de société mais un problème anthropologique. Ce sujet se situe à un autre niveau que  l’éducation ou l’exercice de la volonté, il faut sortir du champ éducatif pour le considérer. Á la manière du héros du film « Matrix », il faut sortir du système des écrans pour y rentrer à nouveau différament. Et pour cela 3 axes d’action dans nos vies:

Le Rapport à l’espace

Nous sommes  des déracinés. Jésus a d’abord passé 30 ans à Nazareth, c’est l’homme de l’enracinement, de la stabilité. Le verbe « demeurer » revient souvent dans l’Evangile de St Jean. Il faut vivre cette action spirituelle qui consiste à « demeurer » (qui est différente de l’action d’habiter). Le rapport à l’espace est essentiel. Quand notre téléphone, nos écrans sont partout avec nous, nous transportons notre déracinement, nous trimballons avec nous un mondialisme.

Un des exemples du déracinement dans l’espace: le téléphone ou autre écrans dans le lit, la chambre DOIT être une zone blanche, sans téléphone. On retrouve alors le plaisir de lire, de parler… si on veut que les enfants n’aient pas de tel dans leur chambre, il faut que nous nous y mettions. On peut aussi choisir de laisser le téléphone dans la voiture quand on rend une visite ou ne pas le sortir lors d’un trajet à pieds ou en transport. Si on ne sait pas faire cela, on ne sait pas demeurer dans l’espace.

Le Rapport au temps

Le temps des écrans, c’est le temps des instants tous pareils. Notre perception du temps n’est pas toujours linéaire, elle est différente selon les individus C’est notre capacité de narration de qui on est et de qui on veut devenir.
Dans la vie, on a des rendez-vous, et comme un train, soit on les prend, soit on les rate. Il faut apprendre à veiller pour ne pas rater ces rendez-vous, pour un épanouissement total. Jésus dit « mon heure n’est pas encore arrivée ». C’est le kairos : le temps du moment opportun. Le kairos du blé c’est de le ramasser ni trop tôt ni trop tard. Les écrans nous font manquer certains kairos.

à choisir nos notifications. Est-ce que Le Figaro a le droit d’interrompre notre continuité ? pareil pour la dernière ânerie envoyée par notre cousin sur WhatsApp… A  qui donnons-nous le droit de nous interrompre ?
à faire une zone blanche de tous les moments de qualité :  par exemple les repas et tous les moments où on fait quelque chose de gratuit qui élève l’âme (balade, musique, art…)

Le Rapport à l’autre

Il faut s’interroger sans complaisance : nous pouvons faire autrement. Laissez-vous surprendre par vos enfants. Stéphane Blocquaux dit « intéressez-vous à ce que vivent vos enfants. S’ils sont fana de jeux vidéo, essayez d’y jouer ne serait-ce que pour comprendre ce qu’ils vivent. »
Il faut reconnaître ensemble, en couple, qu’il y a un enjeu afin de décider ensemble de reprendre la main.
Essayer de retrouver la gratuité de la véritable écoute de l’autre (sans regarder mon tel en même temps).
Les moments de qualité (sans écrans) font partie de la relation à l’autre car ils sont un des langages de l’amour.

Père Jean-Baptiste Bienvenu « ils nous bouffent« , editions artège, 2021.

smartphone et écran

Quelques « trucs » :

-boite à téléphone où réunir tous les téléphones et tablettes de la maison le soir…

-règle des 4 PAS = Pas dans la chambre, pas le matin, pas aux repas, pas le soir.

-idée de la zone blanche de la chambre (= sans écran) ..Une chance : nous sommes la génération qui a connu la vie sans le smartphone.

Stanislas est un établissement privé catholique associé à l’Etat par contrat, fondé en 1804 par l’abbé Claude Liautard dans le quartier Notre-Dame-des-Champs à Paris.
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